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Je claquai la porte de mon appartement et dévalai les escaliers du troisième étage de mon appartement haussmannien jusqu'au 1er étage. Elle m'attendait sur le palier, ses sourcils froncés en deux accents circonflexes, ce qui ne ternissait en aucun cas sa beauté surnaturelle. Armande avait ce type de grands yeux sombres en amande qui faisait tomber en disgrâce toute personne croisant sa route. Sa chevelure de jais tombait en cascade le long de son dos. Ses minces lèvres et son teint méditerranéen se complétaient à merveille avec sa silhouette en "8", comme diraient les fans de mode. Elle possédait des formes, mais c'était ce que je préférais chez elle. Je ne m'étais cependant jamais sentie "menacée" par Armande, ni jalouse de ses atouts. J'étais bien dans mon corps, même si les canons de beauté d'aujourd'hui m'incitent toujours à faire attention à ma prise de poids, je me battais encore sur ce point. Je n'étais pas grosse, loin de là. J'avais toujours été fine, voire "maigre" étant petite. Aujourd'hui, je mangeais correctement, je faisais du sport, et tout comme Armande, j'avais des cuisses, un peu de ventre et une poitrine quasi-inexistante. Sur ce dernier point, je ne m'en plaignais pas. Faire du sport avec trop de seins, c'était l'enfer ! Les similitudes s'arrêtent là. Armande avait les cheveux bruns, moi ils étaient châtains clairs ; elle avait les yeux sombres, les miens étaient bleus, mais pas un bleu clair magnifique, non, un bleu un peu terne qui tirait vers le gris.
"Enfin !" Rochinha Armande.
"Désolée Ary, je ne trouvais plus mes clés," soufflai-je en reprenant ma respiration.
"Mauvaise excuse," rétorqua-t-elle en prenant la tête de la marche vers le rez-de-chaussée. "Tiens, prends-le." Elle me tendit un petit porte-clés en perles. Son geste me toucha plus que je voulu bien l'admettre.
Je suis la pro pour perdre mes affaires, mon TDAH n'aidant en rien. J'avais été diagnostiquée tardivement. Mes symptômes étaient quasi-invisibles, et la plupart des gens les oubliaient ou ne les prenaient pas en compte. Mon hyperactivité n'était pas physique comme la plupart des gens l'imaginent, mais mentale (chez les femmes TDAH, c'est plus souvent le cas). Mon cerveau ne savait tout simplement pas se mettre en veille. À croire qu'aujourd'hui, il avait décidé que plutôt que de se souvenir de l'emplacement de mes clés, il avait embauché un DJ en CDI afin de passer une musique en boucle. Mon obsession du moment était une chanson de Florence + The Machine : "The Girl with One Eye". À chaque fois que je l'entendais, je m'imaginais une pirate féministe voguant sur l'océan tumultueux du patriarcat. Je suivais Armande dans les couloirs du métro. Nous arrivons après une vingtaine de minutes à notre destination. Un magnifique hôtel particulier à deux pas de Montmartre. Je n'en revenais toujours pas travailler dans ces locaux. Armande était ma voisine de deux étages en dessous et ma voisine de bureaux ici, dans cette bâtisse. Nous ne savions pas que nous habitions dans le même immeuble jusqu'au jour où elle a cru que j'avais craqué sur elle et qu'en bonne psychopathe, je l'avais suivie jusqu'à sa porte. À noter que le rouge remplit encore aujourd'hui ses joues à l'évocation de cette histoire. Elle m'avait hurlé dessus, avait claqué la porte au nez et, quand elle l'avait rouverte pour voir si j'étais partie, quelle fut sa surprise de me trouver deux étages au-dessus dans l'escalier, puis de disparaître dans mon appartement. Le lendemain, elle m'avait attendue sur le palier du premier étage, avait présenté ses excuses, et depuis, elle m'attendait chaque jour sur le palier pour faire la route ensemble jusqu'au bureau. Armande était architecte, et moi, urbaniste. Nous collaborions régulièrement ensemble pour produire des projets d'éco-quartiers et de renouvellement urbain. Nous étions en ce moment sur la réhabilitation d'une friche en logements mixtes dans le 20e arrondissement. Armande était allée sur le chantier cet après-midi pour voir l'évolution des travaux. Nous devions faire le point ce matin. Nous nous installions dans mon bureau sur des petits fauteuils, bien plus confortables que nos chaises de bureau.
"Dis-moi tout !" déclarai-je en prenant mon petit calepin pour noter les avancées du chantier.
"Les concessionnaires réseaux sont passés ce matin, c'est bon ! Les logements auront du courant !"
"Hourra !" m'exclamai-je sarcastiquement.
"Les fondations ont été coulées, et j'ai vérifié le positionnement de la chapelle, tout est bon !"
"Parfait, j'irai m'entretenir avec Richard pour la suite."
Richard était le doyen du projet. La plupart des gens le trouvaient grognon, mais moi je l'aimais bien. Il me rappelait mon grand-père. Après quelques échanges de potins sur l'équipe du projet, Armande se leva et se dirigea vers la porte. Elle s'arrêta juste à l'entrebâillement et se tourna vers moi, les yeux pétillants de malice.
"Au fait, le porte-clés que je t'ai donné ce matin…" commença-t-elle avec suspense.
"Oui ?" demandai-je en l'interrogeant du regard.
"On l'a trouvé sur la friche avant la coulée du béton. Il était particulièrement en bon état pour un objet trouvé dans pareil endroit, alors je l'ai récupéré."
"Tu l'as volé, tu veux dire ?" ricanai-je.
"Question de point de vue." Elle haussa les épaules et partit en direction de son bureau .
J’observais à présent mon petit porte-clés volé, trouvé, offert. Il était composé de trois parties : une petite chaine en argent au bout de la quelle était accroché une petite épée, d'une plume de paon et d'une petie breloque; une perle ronde de 3cm de diamètre environ, d'une couleur gris métallique.
Il faisait nuit quand je poussais enfin la porte de mon appartement. Avec un soupir de soulagement, j'enlevai mon manteau, mes chaussures et jetai sans ménagement mon sac à dos contre le meuble de l'entrée. Il s'y heurta dans un bruit sourd, et mon regard tomba sur le petit porte-clefs offert par Armande le matin-même : la petite perle brillait de reflets chatoyants malgr…
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Je me levais comme tous les matins à 7h, mangeais comme tous les matins deux tartines de pains avec de la pâte à tartiner, m’habillais comme tous les matins, c’est quand je pris mes clés (pour une fois rangées dans la boîte à clés) que je le sentis, un mauvais pressentiment. Je savais que quelque chose de g…
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