Abandon

Entendant résonner le message de son second dans le cockpit, le capitaine se reprit. Il devait tout faire pour s'en sortir. Pour faire en sorte que tout le monde s'en sorte indemnes. Bien évidemment, il savait que c'était une mission impossible car contre Eux, il n'y avait rien qui puisse les vaincre. En tous cas, les recherches actuelles n'avaient pas trouver d'armes efficaces pour les repousser. 

Il poussa un soupir, à deux doigts du découragement total et regarda la carte spatial qui s'étendait sur la vitre principale de son écran. Tandis qu'il réfléchissait à leurs possibilités de fuite, l'armurier revint, essoufflé et porteur de mauvaises nouvelles. 

• - Capitaine… J'ai vérifié les caractéristiques techniques du vaisseau et les boucliers ne sont actuellement plus opérationnels, ce qui risque de causer du dégât à long terme sur les couches externes du vaisseau. Ils ont endommagé l'aile gauche, y compris un des propulseurs, cependant, l'attaque énergétique n'a pas réussi à percer la coque donc nous n'avons pas de dépressurisation des cabines. Les unités de réparages sont en route, nous leur avons transmis le message, ils vont s'occuper de renforcer les parties fragilisées. 
•  
• - Merci pour ce rapport Sath.

L'homme se dandina, visiblement mal à l'aise. 

• - Capitaine, ce n'est pas le seul problème. Ils ont visé les réserves de fusées ainsi que les tourelles… Leur nouveau dispositif… il semblerait que nos moyens de riposte aient totalement grillés… 

Le capitaine n'eut pas le temps de réagir à cette terrible nouvelle. Une nouvelle secousse ébranla l'appareil, projetant l'ensemble du cockpit à terre. Une alarme rouge commença à clignoter dans la cellule, annonçant un trou dans la coque. Les membres de l'équipage se remirent tant bien que mal debout, peinant à trouver leur équilibre. En effet, le vaisseau commençait à dériver, penchant de plus en plus vers la gauche. Puis le silence… Comme si le monde avait été plongé dans une boule de coton, les sons parvenaient de manière amoindrie aux oreilles des humains présents. Karl avait du mal à respirer, pris d'assaut par la panique. Il se força à reprendre une respiration plus calme et à maitriser sa peur. Il se tourna vers son second qui le fixait, sachant pertinemment les pensées de son ami. Dans ses yeux, on ne pouvait lire que la terreur. “Ils arrivent…”

Reprenant ses esprits, ne pouvant prendre de pause, le capitaine prit une grande inspiration. Il n'y avait qu'une seule chose à faire… Il prit le micro et hurla : 

• - Nous abandonnons le vaisseau. Repliez-vous dans les capsules de secours. Récupérez le matériel de survie et les armes. Nous quittons le vaisseau. Ceci n'est pas un exercice. Veuillez suivre la procédure d'évacuation d'urgence. 

Tout en donnant l'ultime ordre, le capitaine pianota sur son écran, envoyant les données de navigation sur le pod attaché à son poignet. Puis suivant scrupuleusement les procédures, il récupéra le matériel essentiel pour la survie et la mission et se rua vers les capsules de secours, suivi de l'ensemble du cockpit. Dehors, c'était la débandade. Loin des exercices soignés et ordonnés, ils étaient actuellement en plain chaos. Heureusement à la vue de leur chef, les membres de l'équipage se calmèrent, un peu honteux et reprirent les activités, de manière moins chaotique. 

Le premier hurlement leur glaça le sang. Tout comme le silence avait enveloppé le bâtiment, les hurlements leur parvenaient à l'état de murmures, ce qui ne faisait que renforcer le sentiment de terreur qui étreignait leurs coeurs. Karl ferma les yeux. Il ne pouvait plus rien faire pour ces malheureux. Bientôt ils seraient transformés… De toute manière, leurs âmes n'existaient déjà plus à ce stade. Ne restait que l'enveloppe corporelle… qui elle-même ne ressemblerait bientôt à rien de ce que les hommes n'ont jamais connu. Un long tentacule noir fit son apparition au bout du couloir. Ce fut le signal. 

Karl plongea dans la capsule, hurlant à l'ensemble de l'équipage de faire de même. Il vit Reyl et Sath le suivre, tandis que le reste se démenait pour rentrer dans les capsules. Les 5 places occupées, l'habitacle se referma, empêchant le tentacule de frôler les occupants. Sans plus attendre, Karl mit les gaz, éjectant dans le vide la petite capsule. Il souffla de soulagement et regarda derrière lui. Le vaisseau était en flamme, ce qui était improbable dans le vide spatial. Ce n'était qu'une illusion, il le savait, mais cela lui fit un pincement au coeur. Prenant la petite radio, il entreprit d'envoyer un message à son équipage… du moins ce qu'il en restait. 

• “A toutes les capsules, je vous transmets les coordonnées vers lesquelles nous devons nous rendre. Nous mettons de suite le cap sur une nouvelle planète. Espérons qu'elle soit plus accueillante que la précédente. Nous pourrons établir un bilan lors que nous aurons atterris. Je suis sur le canal 37, si vous souhaitez me contacter"