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Je savais pertinemment que ce n'était pas un rêve comme les autres.
Il revenait régulièrement, nuit après nuit. C'était vraiment rare qu'un rêve fasse ça.
Il avait un autre contour que les rêves que j'avais pu connaître par ailleurs.
Un contour de réalité. Une épaisseur de réalité. Une dimension autre que tous les rêves qui avaient pu venir me hanter de par le passé.
C'était toujours le même rêve qui revenait en boucle, se répétait, parfois une seule fois dans la nuit, parfois il revenait du moment du coucher à l'aube.
Jour après jour, avec une force quasi identique.
Leitmotiv obsédant.
Je roulais sur une route de campagne. Une de ces routes de campagne comme on en voit tant. De part et d'autre, de petits villages, des champs, des bois...Une route déserte...Et puis cette silhouette, au loin...D'abord totalement imprécise, puis qui, alors que je m'approchais, devenait de plus en plus nette.
Je ralentissais, et elle faisait les cent derniers mètres vers moi, moi qui avais immobilisé le véhicule.
Une très jolie femme brune, jeune. Enveloppée dans un manteau, qui, pendant qu'elle courait, elle marchait maintenant simplement d'un pas rapide, s'écartait pour révéler de belles jambes. Sur son visage aux traits purs, une immense frayeur.
Elle ouvrait la portière, me disait:
--Je vous en prie, prenez-moi avec vous, ils veulent me tuer.
Tout en elle reflétait la peur. Je lui disais de monter. Elle s'installait. Le manteau glissait, dévoilant ses cuisses, tout comme en haut, les pans s'écartaient. Elle était nue en dessous.
--Démarrez...Ils sont là. Ils ne sont pas loin.
J'obéissais. Me demandant ce qui m'attendait.
Je continuais sur la route. Et ça se produisait à un croisement. Quatre routes se rejoignaient. Il y avait deux arrêts de bus et des voitures garées autour.
Des hommes surgissaient des véhicules, et ils tiraient. Fusils de chasse, fusils à pompe, pistolets. Les balles faisaient exploser les vitres, traversaient la carrosserie, et pénétraient dans nos chairs. Je la voyais se tordre sous l'effet des impacts, et son sang couler.
Je me réveillais en criant, généralement couvert de sueur. Secoué par le réalisme de la situation.
A tort ou à raison, j'ai vite été convaincu que ce rêve avait valeur de réalité, mais d'une réalité qui allait de produire.C'était une sorte d'avertissement.
Je ne savais pas quand, mais ce dont je rêvais allait se produire.
Le meilleur moyen de court-circuiter cette tragédie, c'était de se renseigner, pour faire en sorte que cela ne se produise pas.
Le rêve, je le connaissais par cœur à présent, de telle sorte que, même éveillé, je pouvais me repasser les images qui le constituaient.
Je savais dessiner, et j'avais fait un portrait-robot de la jeune femme.
Et j'avais un autre indice d'importance: un panneau de signalisation qui annonçait VERDOLLE 14 km.
Je me suis décidé à faire quelques recherches.
Le petit village de VERDOLLE existait bien. Il était à 137 kilomètres de chez moi. 2432 habitants.
Il fallait que j'y aille.
J'étais convaincu que je ne risquais rien en y allant maintenant. J'avais le sentiment étrange d'une distance entre ce dont je rêvais et le moment présent.
Au contraire, y aller serait le moyen de désamorcer les choses.
J'ai pris ma voiture un jour de congé et je suis parti pour Verdolle.
La route serpente entre les collines verdoyantes, débouchant finalement sur Verdolle. Le village, semblable à une image figée dans le temps, s'étire sous un ciel plombé. Les maisons de pierre aux toits d'ardoise, l'église imposante, tout semble respirer une tranquillité trompeuse. Je gare ma voiture près de l'&eacut…
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