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J'ai retourné toute la maison, vidé les tiroirs des commodes, ouvert chaque livre de la bibliothèque, fouillé les poches des vieux vêtements de ma tante empilés dans le dressing. J'ai sauté à pied joint sur chaque latte du plancher, espérant entendre un son creux, un déclic d'une trappe secrète. J'ai ouvert chaque coffret à bijou, chaque boîte de médicaments usagers qui s'entassaient derrière le miroir à double fond de la salle de bain. J'ai retourné le lit, inspecté les faux plafonds de la buanderie, tâté le dessous du rempaillage des chaises de la salle à manger, éventré un vieil ours en peluche défraîchi et même abattu une fausse cloison dans le couloir de l'entrée, pour n'y trouver qu'un vieux placard hors d'usage et assez laid. Tous mes efforts n'ont servis à rien. Je n'ai pas trouvé la clef. Au bout d'une semaine de recherches intensives, je me suis arrêté, lassé. Et pourtant, toutes les nuits, le même rêve, et ma tante m'invitant à savoir.
Un jour, alors que je me préparais à dîner, j'ai remarqué au fond de l'armoire de la cuisine un pot de confiture. Ravi, j'ai ouvert le bocal qui a cédé dans un POP réconfortant. La délicieuse odeur d'abricot cuit s'est répandue dans la pièce et j'ai plongé ma cuillère dans le nectar. Toc, quelque chose de dur est entré en contact avec le métal de la cuillère. Pris d'une soudaine frénésie, j'ai plongé mes doigts dans le pot et les en ai ressorti avec, au bout, une grosse clef en fer.
Sans prendre le temps de la nettoyer, j'ai couru au grenier, enfoncé la clef dans la serrure, et sans effort, je l'ai tournée jusqu'à ce que le pêne cède. C'était ouvert. On ne voyait rien sinon une obscurité totale. J'ai avancé ma main, et l'ai glissée sur le côté, à la recherche d'un interrupteur, mais je n'ai pas trouvé la paroi. Surpris, je me suis penché un peu plus vers cet espace vide.
Ce néant. Jusqu'à ce que revienne la lumière. Une scène familière se jouait là, dont j'étais à la fois l'acteur et le spectateur. C'était mon rêve, et j'y voyais ma tante comme je l'avais vu cette nuit, au pays des songes. Cependant, le rêve se prolongea et ma tante me félicita d'avoir trouvé la clef:
- C'était ton parfum préféré, mon trésor, je suis surprise que tu aies mis tant de temps à la trouver.
- Quel est cet endroit exactement ? demandais je, curieux
- C'est l'endroit où tu vas quand tu rêves ! me répondit-elle, comme si c'était une évidence
- Cet endroit est donc bien réel ?
- Bien réel, oui… j'y ai passé tellement de temps, avec mes petits… Oh bien-sûr, tu y étais aussi mon trésor, et tu jouais avec tes cousins adorés. C'était un vrai plaisir de vous voir tous ensemble.
- Mais, ma tante, tu n'as jamais eu d'enfants… Ce n'était pas réel, juste des rêves.
- C'est ce que tu crois, mais moi je te dis qu'ici les rêves prennent vie. Tu devrais d'ailleurs te méfier, car la porte marche dans les deux sens. N'oublie jamais de la fermer à clef.
Sans voix face à ces révélations, je décidais de rebrousser chemin, légèrement sceptique. Je tournais la poignée de la porte et me retrouvais dans le grenier, comme si je ne l'avais jamais quitté. Complétement déboussolé, je ne pris pas les avertissements de ma tante au sérieux, et oubliais de verrouiller la porte. La clef toujours dans ma poche, je retournais à mon dîner, me persuadant que ce que je venais de vivre n'était pas la réalité.
Et cette nuit-là, je fis un cauchemar…