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Je ne suis pas sûre d’avoir correctement respecté la règle 3 du défi, mais je vous laisse en juger.
Le fait est que je trouvais le délire très sympa et tout à fait propice à se lancer à nouveau dans l’exercice de la nouvelle (exercice dans lequel je débute, ce n’est que la deuxième que j’écris).
Bref, bonne lecture à vous qui passez par-là :)
Bat.Jacl , le 9 novembre 2023 20:25
Merci d'avoir participé à cette boite à rêve 💚😊
Défi réussi pour une très bonne lecture. Un texte qui me touche et avec une morale bien amenée, je ne peux qu'apprécier !
Mention spéciale au tout début, sur la façon de nous introduire Coline, qui fonctionne très bien
Lyn , le 9 novembre 2023 22:43
Ouais, j'avais un peu peur que ça ne corresponde pas à ce que t'attendais, parce qu'il faut reconnaître que l'aspect "dilemme" est assez peu présenté (en même temps on parle d'une petite fille et, autant je ne remets pas en question la capacité des enfants à réfléchir, autant on ne peut pas dire qu'ils aient des raisonnements très poussés).
Le début est inspiré de l'examen du Face Pain Scale (échelle des visages), je n'ai pas la moindre idée de si ça se fait en psychothérapie mais pour nous autres kiné on nous en parle pour évaluer la douleur chez les très jeunes patients ;)
Bref, tout ça pour dire 1) prenez soin de vos animaux 2) un animal c'est de l'amour et des contraintes 3) ne prenez jamais un animal pour faire une surprise à quelqu'un, c'est comme pour un enfant, ça se médite 😊
Coline avait bien compris que cette dame n’allait ni la punir, ni la noter.
Les notes. C’était bien ce qui avait inquiété ses parents en premier.
La dame avait des lèvres cerise, des cheveux barbe à papa et des yeux réglisse. Coline n’aimait pas trop la réglisse mais la dame lui donna une boîte de crayons de couleur et ça, elle aimait bien.
— Tu n’en prends qu’un seul.
Alors elle prit le rose, sa couleur préférée.
La dame lui donna une feuille. Sur la feuille il y avait des bonhommes, classé du plus souriant au plus triste.
— Tu peux colorier celui qui te ressemble le plus ?
Coline en choisit un sur la droite, très appliquée à ne pas dépasser.
— Il a l’air heureux ce bonhomme ?
Coline pensa que non. Alors elle fit « non » de la tête.
La dame lui donna une autre feuille. Sur celle-ci, il n’y avait que son bonhomme triste et du blanc, beaucoup de blanc.
— Pourquoi il est triste, tu penses ?
Coline comprit que le blanc c’était pour dessiner autour. Alors elle dessina le jardin et la clôture. Ouverte, la clôture.
— Tu peux m’expliquer ?
— Eh bah, le bonhomme, il a perdu son chien.
— Il est où son chien ?
— Parti.
— Parti où ?
— Dehors. En fait, il est parti dehors parce que c’était ouvert. Et il est plus là. Alors il est triste.
— Et tu penses qu’il faudrait quoi pour qu’il ne soit plus triste ?
Un chien. Aussi, elle prit soin de bien fermer la clôture pour qu’il ne se sauve pas.
— Donc il a un chien et il est heureux ?
— Oui.
— Tu aimes bien les chiens ?
— Et tu en veux un ?
Elle fit « oui » de la tête.
— Tu sais, je suis un peu une fée, moi.
Le regard de Coline s’alluma. Elle n’avait jamais vu de fées en vrai, mais elle avait quand même un doute :
— Mais vous avez pas d’ailes…
La dame rigola doucement, sans ouvrir la bouche. Encore, elle partit chercher quelque chose, un livre, Cendrillon. Coline connaissait le dessin animé et admit que la fée marraine n’avait pas d’ailes.
— Et vous avez une baguette magique ? demanda la fillette avec une curiosité non dissimulée.
— Je n’utilise pas une baguette mais plutôt ceci.
Une boîte. Elle n’avait rien de spécial cette boîte. C’était juste un cube blanc. Il n’y avait rien d’autre qu’une petite feinte, comme une tirelire.
— Tu peux écrire ce dont tu rêves et ça se réalisera.
— Ce que je rêve ?
Ça, ça allait être compliqué. Coline savait qu’elle rêvait, qu’elle faisait des cauchemars aussi, mais elle oubliait tout, ou presque, au réveil.
— Ce dont tu as envie. Comme le bonhomme.
Coline sentit les larmes lui monter aux yeux, en même temps qu’une boule dans sa gorge.
— Mais attention, si on utilise la magie ça aura un prix. Mais tu vois, Cendrillon ? Le sort s’arrête à minuit.
— Après le carrosse redevient la citrouille.
— Si tu veux que ça dure plus qu’une journée, il va falloir que tu me donnes quelque chose.
— Faut voir avec Papa et Maman pour les sous.
La dame rigola à nouveau.
— Tu te rappelles que nous parlions de rêve plus tôt ?
— Oui…
— Les rêves, c’est comme des gâteaux. Et je ne peux pas faire de gâteaux si je n’ai pas de farine, d’œuf ou de lait.
— Et on fait comment les rêves ?
— Avec des souvenirs. Des choses que tu as vues, entendues, goûtées ou senties. Par exemple, si tu rêves de manger le meilleur gâteau au chocolat du monde, c’est sans doute parce que tu as vu ce gâteau.
— Et si vous prenez ça, alors je vais oublier le gâteau ?
— Je me rappellerais plus que j’en voulais, alors.
— Non. Ce sera comme une surprise.
À ce mot bien précis, des étoiles brillèrent dans les yeux de Coline. Madame la fée lui expliqua qu’elle devait juste écrire ou dessiner son rêve sur une feuille et le glisser dans la boîte. Cette étape accomplie, il ne restait plus qu’une dernière chose à faire :
— Tu vas secouer la boîte très, très fort. Le plus fort que tu peux.
Coline secoua.
— Secoue !
Coline secoua encore.
Secoua plus encore.
Secouer, secouer, secouer.
— C’est bon !
C’était fini. C’était marrant. De ce que Coline comprit, tout irait mieux d’ici peu, parce que le mauvais ne serait qu’un mauvais souvenir qui disparaîtra ; le meilleur restait à venir.
« Ça fera soixante s’il vous plaît », furent les derniers mots de la fée, avant qu’elle reparte avec Papa et Maman.
⁂
Coline ignorait si madame la fée était vraiment magicienne, mais elle connaissait le père Noël ! Au pied du sapin l’attendait un gros carton troué duquel émergea la truffe humide d’un petit chiot en attente de câlins.
— Il faut lui trouver un nom, dit Maman.
— Choco !
— Mais c’était déjà le nom de celui d’avant ? douta Papa.
— « Avant » ? répéta Coline, incrédule.
— Celui que tu avais eu à ton anniversaire…
Ne comprenant pas où ses parents voulaient en venir, Coline abandonna la conversation lorsqu’elle remarqua le petit chiot s’aventurer dans les décombres de papiers cadeaux, un ruban déjà entortillé autour d’une patte.
— Hé, te sauve pas !
Papa et Maman ne firent plus jamais mention du premier Choco. « Les enfants occultent parfois des évènements », avait dit la psychologue, « c’est une façon de se protéger d’un traumatisme ». Alors il avait été unanimement admis que Choco bis était le premier Choco de la famille.
— Merci Papa Noël, merci la fée !
Un Choco avait demandé trop de nouvelles habitudes à sa maîtresse, comme se lever plus tôt pour l’emmener faire pipi avant l’école, ou l’emmener jouer une fois rentrée. Alors que ses journées étaient bien assez longues comme ça. Pire encore quand il y avait la poésie, la dictée ou les tables de multiplication à apprendre pour demain. Parfois, les parents faisaient tout ça et elle avait peur de rentrer à la maison, peur d’être grondée.
Un Choco avait demandé trop d’indulgence à sa maîtresse, lorsqu’il avait estropié une de ses poupées préférées, une princesse qui chante et que la petite voisine d’en face lui enviait. Le temps d’une après-midi, elle pouvait l’échanger avec sa poupée princesse qui chante, mais ce n’était ni les mêmes chansons, ni la même couleur de cheveux, ni la même robe, alors c’était mieux. Maman avait enturbanné ses mains meurtries avec du sparadrap, « C’est comme si elle portait des gants » avait-elle dit. La petite voisine d’en face ne voulait plus jouer avec, elle ne faisait plus envie, n’avait plus de valeur.
Un Choco avait demandé trop de dépenses à sa maîtresse, parce que les parents refusaient de le lui acheter. Pourtant ça ne les avait pas empêchés de se plaindre du coût de la stérilisation et des soins vétérinaires nécessaires pour que l’animal puisse se déplacer malgré sa patte folle. Elle aurait pu s’acheter un smartphone avec ses économies, ça aurait été plus rentable.
Un Choco avait demandé trop de sacrifices à sa maîtresse, alors que l’été n’arrive qu’une fois, particulièrement bienvenu après une éprouvante session de partiels. À la plage, les chiens, eux, n’étaient pas bienvenus et il n’était ni question de changer le programme, ni pour elle, ni ses amis, ni ses parents qui partaient aussi de leur côté.
Nicole avait connu Coline petite fille et la revoyait aujourd’hui jeune femme, empêtrée dans une culpabilité toujours plus contradictoire à mesure qu’elle prenait de l’âge, des responsabilités, et de la distance par rapport à la réalité de son entourage qui se souvenait de chaque Choco accueillis et aussitôt regrettés.
Nicole se fit la reflexion qu’elle aussi prenait de l’âge.
— Et tes études ? questionna-t-elle. Comment ça se passe ?
— J’ai pris une année sabbatique. Enfin, ça c’est ce que j’ai dit à mes parents, parce que je me demande si ça me plaît en fait.
Un jour, Nicole expliquera à Coline que ce dont les gens ont envie c’est d’oublier leurs mauvais souvenirs pour passer à autre chose, mais que ce dont ils ont besoin c’est de les chérir pour en tirer une leçon.
Un jour, Nicole expliquera à Coline que donner aux gens ce dont ils ont besoin, ce n’est pas ce qui renfloue les caisses.
Un jour, Nicole expliquera à Coline comment être la fée.
Elle lui expliquera après un dernier Choco.
— Ça fera soixante s’il te plaît.
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