Défi : Les Nouveaux Dieux Postulat de départ : Un dieu ne peut vivre qu’au travers des croyances de ses fidèles. Or la population est soit deven…
L'été approchait, et avec lui, le soleil chauffait de plus belle. Il n'était même pas midi, et pourtant, Aura sentait les premières perles de sueur couler le long de son dos. Elle s'épongea le front en se relevant, s'étira, et mit sa main en visière pour observer le ciel bleu et dénué de nuages. Une belle journée alors que le mois de mai débute à peine.
"Eh, oh, tu m'écoutes un peu ?"
- Je n'ai pas vraiment le choix, soupira l'adolescente en se remettant au travail.
Son petit sourire en coin trahissait son amusement. Sur l'écran de son téléphone, Dante arborait un air offensé qu'elle savait tout aussi feint. Elle s'en détourna pour s'occuper de son petit lopin de terre qui, d'ici quelques semaines, allait offrir une partie de la nourriture nécessaire aux résidents de son havre.
"Qu'est-ce que j'ai dit, alors ?"
- Que le thé de ta famille d'accueil était bien meilleur que le mien ?
"Ok, ça passe. J'ai trouvé plein de variété différentes au marché, tu veux que je t'en ramène ? Je pense revenir en France le mois prochain, je pourrai passer te voir."
L'adolescente acquiesça avec enthousiasme, toujours ravie de remplir un peu plus son armoire qui débordait déjà tant il lui avait envoyé de cadeaux. A ce jour, son thé préférait était celui à la menthe qu'il lui avait envoyé du Maroc. Elle n'en avait pas encore qui venait tout droit de Chine, cela fera un bel ajout et elle se fera un plaisir de préparer une théière lorsqu'ils seront réunis autour du feu, en espérant qu'il soit à la hauteur de ses attentes.
Le son d'une porte brutalement ouverte suivie des rires de deux enfants se ruant dehors la fit grimacer. Derrière eux suivaient leurs parents souriants et sereins, chacun portant un bébé dans leurs bras. La famille était arrivée hier, ses membres pâles, énervés, échevelés. Les enfants et les bébés pleuraient, du miel pour les oreilles d'Aura qui avait préféré fuir et se réfugier dans sa chambre.
En l'apercevant, le père sourit et lui fit un signe auquel elle allait répondre, quoiqu'avec moins d'enthousiasme, lorsqu'elle sentit les poils de sa nuque se hérisser. Elle se raidit, tourna son regard vers le chemin boisé menant à la route un bon kilomètre plus loin. En tendant l'oreille, elle entendait les pieds foulant le sol et les voix se mêlant les unes aux autres. Elles se taisaient religieusement lorsqu'un homme s'adressait à eux, voix ronde, puissante, charmante.
"Aura ? Aura, tout va bien ?"
- Je te rappelle.
Elle raccrocha en se relevant et fit signe à son frère pour attirer son attention. D'un signe de tête, elle lui désigna ensuite le chemin. Abandonnant un instant son groupe, il disparut entre les arbres avant de réapparaître, se dirigeant au pas de course vers leur maison. Aura demeura là, à l'écart mais alerte, les yeux rivés sur le portail en bois constamment ouvert.
Il arriva le premier, menant une vingtaine de personnes. Droit, le torse bombé, il s'arrêta pour observer les environs de ses yeux gris en se passant la main dans ses cheveux châtains. Clairs, mais pas tout à fait blonds. Puis, son regard se posa sur elle. Son sourire s'élargit. L'adolescente s'assombrit. En un instant, elle vit tout ce qu'il était, et tout ce qu'il n'était pas. L'arc dans son dos n'était pas là que pour faire joli. Et sa voix, lorsqu'elle jaillit de sa bouche, était claire et mélodieuse, aussi douce que du velours.
- Quel endroit charmant ! Parfait pour se détendre et se reposer. Je comprends qu'il soit aussi prisé.
La porte d'entrée claqua et la mère d'Aura, Lucie, sauta les marches du perron en observant d'un oeil mauvais la foule d'inconnus dont les téléphones photographiaient et filmaient tout sans le moindre respect. C'est à leur guide qu'elle s'adressa, les mains sur les hanches.
- C'est une propriété privée. Seuls ma famille et mes clients sont les bienvenus. Je vous demande à tous de partir, ou je ferai appel à la police.
- La police n'a aucun pouvoir sur moi, répliqua l'homme sans la regarder. Ne vous inquiétez pas, nous ne sommes pas là pour semer le chaos.. Je suis venu la chercher elle.
Du menton, il désigna Aura avant de se tourner vers ses fans. Les caméras étaient sur lui et plus personne ne prononçait le moindre mot.
- Mes amis, et vous tous qui ne pouvez être ici avec nous, regardez-bien ! Comme promis, je vous présente un dieu. Un véritable dieu !
- Ma mère t'a dit de partir, siffla Aura.
Devait-elle agir ? Cela n'arrangerait probablement rien. Au contraire.
- Pourquoi cet endroit est-il si apprécié ? Pourquoi toutes les personnes séjournant ici en repartent apaisées, revigorées, reposées ? C'est parce qu'elle est là. Hypnos ! Dieu du Sommeil !
Il lui fit à nouveau face en montrant ses dents parfaitement blanches.
- Longtemps je t'ai cherché, Hypnos. Depuis que Hermès m'a parlé de toi.
Elle allait le tuer. Elle allait tuer Dante. Le priver de sommeil jusqu'à le rendre fou.
L'intru s'inclina presque moqueusement, bras ouverts vers l'extérieur.
- Je suis Apollon.