Une intense lumière blanche m'aveugla pendant quelques secondes, le temps que mes yeux s'y habituent.Devant moi, il n'y avait rien. Rien d'autre que le vide, et ce blanc omniprésent. Ce…
Chapitre 2:
Chapitre 2, Léo, par GinCor
C'était enfin son tour, la femme aux bigoudis du comptoir le regarda d'un œil torve.
-- Café ? Thé ? Cigarettes ? s'impatienta-t-elle en tapant des chiffres sur sa machine.
-- Un café au lait.
-- On a plus de lait.
-- De la crème ?
-- Non plus.
Il soupira, se pinça l'arête du nez et contenu son agacement.
-- Un thé noir ?
-- Un thé noir, répéta-t-elle en enclenchant une bouilloire.
Il paya avant même de recevoir sa commande et ne partit s'asseoir qu'après avoir vérifié qu'il n'y avait rien de trop suspect ni dans la tasse ni dans le sachet de thé.
On ne faisait pas plus miteux comme lieu, dans le quartier, mais il préférait cela à la foule des autres bars et restaurants, à quelques rues de là.
Il s'était posé près des fenêtres sur une banquette élimée. Son thé était... tiède, mais n'avait pas d'odeur douteuse.
Il y eut un clac, une secousse terrible et le liquide tressauta dans son contenant.
-- Je t'ai enfin trouvé ! Ma parole ! Est-ce que tu ne fuirais pas quelqu'un ? Par hasard ? Ce n'est pas comme si cela ne m'avait pas pris trois semaines !
Il se ressaisit de sa stupeur et regarda l'homme qui lui faisait face, les deux mains plaquées sur la table encore tremblante.
Le cœur battant, il inspira et expira lentement pour calmer ses nerfs.
Le nouveau venu ne le laissa pas plus souffler.
-- Te rends-tu compte du temps que tu me fais perdre à courir toute la ville juste pour que tu fasses ton travail ?
Il le regarda sans comprendre et voulut parler, mais il lui coupa la parole.
-- Bon, je passe l'éponge pour cette fois. À condition que tu ne me poses plus de soucis. J'ai besoin de toi tout de suite. Il faut que l'on s'occupe d'un mirage à quelques minutes d'ici et je ne peux pas le faire tout seul, alors, je propose qu'on y aille.
L'homme pointait un lieu vague du doigt, quelque part à l'Ouest.
Alexi se pinça une nouvelle fois le nez. Sa tête lui paraissait lourde. Que faisait-il déjà ? Il buvait simplement un thé sans intérêt et un camé venait lui raconter ses délires ?
Il se racla la gorge.
-- Je peux savoir qui vous êtes ?
-- On ne te l'a pas dit ? Tu n'étais pas au courant de notre nouvelle collaboration, voilà qui explique tout. Je m'appelle Léo.
-- Et vous souhaitez collaborer dans le cadre de mon travail, le monde de la conciergerie ?
Léo éclata de rire.
Il riait si fort qu'Alex vérifia qu'il ne dérangeait personne autour d'eux.
C'est là qu'il vit qu'il n'y avait pas un chat, plus âme qui vive. Il n'y avait plus de meubles non plus. Il n'y avait plus de bar, plus de bistro, plus de ville.
Tout était blanc.
Il connaissait cela. Il devait être dans son lit, en train de dormir.
Léo se renfonça dans son siège et calma ses spasmes d'hilarité.
-- Très drôle. La conciergerie. Bien trouvé. Bon ? On décolle ? Plus vite on fait le taf plus vite on se repose.
-- Je suis dans un rêve.
Léo replongea dans une cacophonie de gloussements irrépressibles.
-- Un rêve ? Mais qu'est-ce que tu veux dire ?
-- Tout ça, c'est dans ma tête. Tu es dans ma tête, tu n'es pas réel.
-- Mais qu'est-ce qui n'est pas dans la tête ? Au juste ? Je sens que je vais bien me marrer avec toi, la meilleure collaboration de tous les temps.
-- Pourquoi est-ce que tout est blanc si je ne suis pas endormi, dans ce cas ? Où est le bistro minable dans lequel j'étais installé avant que tu ne m'interrompes ? Je faisais un autre rêve ?
Léo sembla reprendre contenance, comme si les choses devenaient tout à coup plus sérieuses.
-- Je propose qu'on s'occupe du Mirage et que l'on règle ton souci personnel plus tard. Cela fait tout de même des semaines qu'il fait des siennes sans que personne ne le remette à sa place. Amène-toi.
Alexi resta assis, en profonde réflexion.
-- C'est l'Univers qui t'envoie ?
-- L'Univers ? C'est que tu es poète. Non, juste la big boss. Comme toujours. Et tu vas avoir affaire à elle si elle constate le retard que tu nous fais prendre. Tu m'as l'air un peu dérangé, on s'occupera de ton cas plus tard.
Léo l'attrapa par le bras et l'extirpa de la banquette, faisant réapparaître le bistro, la femme aux bigoudis et les rues crasseuses.
Il l'emmena dehors sans ménagement, pressé. Et Alexi fut trop décontenancé pour émettre la moindre objection.