Chapitre 1: Lune sanglante, par Wargen

Thiercelieux était un village charmant, paisible, tranquille et monotone depuis que j'étais née. Il y avait bien entendu des histoires, des ragots, des morts, voir même quelques disparus, mais rien de bien différent des autres villages du royaume.

C'est pourquoi la situation me sembla particulière quand, depuis quelques jours, des bruissements, et des murmures flottèrent dans les ruelles, voyageant d'adultes à adultes. Des regards en coin, des messes basses, et voilà que commencèrent à apparaître des ustensiles en argent accrochés aux portes de certaines maisons. Tandis que, dans la nuit, la lune se dévoilait de plus en plus, entière et grosse.

Tout cela pour arriver au sigle rouge et incompréhensible qui se trouve dessiné devant moi, sur la porte de notre maison. Dessiné au sang d'agneau. Je rentre et pose la question à Grand-Mère. Qui se contente de me répondre d'une voix tremblante : « Cela ne te regarde pas, Eden. Ce soir, ferme bien tes volets, ne sors surtout pas de la maison et endors toi tôt. »

Le restant de la journée passée à arpenter les rues me confirme que quelque chose ne va pas. Les sigles en sang d'agneau et les ustensiles en argent imprègnent les murs, portes et fenêtres des maisons et bâtiments.

A la nuit tombée, en fermant les volets, je me rends compte qu'une énorme et pleine lune rouge darde son œil sanglant sur notre village, alors que les rues sont étonnamment vides et complètement silencieuses. Je borde mes frères et sœurs, éteins la chandelle et me mets au lit, tournant le dos à la porte en faisant semblant de dormir. Le parquet grince légèrement quand Grand-Mère passe la tête dans notre chambre, pour s'assurer que tout le monde est bien là et dort profondément. Puis je l'entends se coucher dans la chambre adjacente.

Le temps passe, avant son premier ronflement. Mon cœur bat à tout rompre. M'assurant que mes frères et sœurs dorment profondément, je me relève tout doucement. C'est alors que le hurlement retentit, me faisant sursauter. Heureusement, personne ne se réveille dans la chambre. Malgré la peur, je me sens happée par l'extérieur. Je me lève. Sors de la chambre. Descends le plus prudemment possible les escaliers pour ne pas les faire grincer. Enfile une cape à capuche rouge. Et ouvre tout doucement la porte d'entrée qui me dévoile une nuit rouge sombre inquiétante.